Reprendre un restaurant à la barre du tribunal : Conseils et mode d'emploi

Reprendre un restaurant à la barre du tribunal : Conseils et mode d'emploi

September 28, 2023

Lorsque les entreprises en difficulté sont placées en redressement ou liquidation judiciaire, il peut être décidé de céder leur fonds de commerce.


C’est dans ce cadre que vous pourrez acquérir tout ou partie d’un fonds de commerce de restaurant, à moindre coût et dans un temps réduit par rapport à une acquisition de fonds de commerce classique, à la condition toutefois que vous n’ayez aucun lien direct avec l’entreprise rachetée.


Concrètement, comment cela se déroule-t-il ?


Au départ : un appel d’offres


Vous pourrez trouver les offres émises par l’administrateur judiciaire sur plusieurs sites, tels que :

-          https://www.aspaj.fr/je-veux-reprendre-une-entreprise/les-annonces/

-          https://assets.maydaymag.fr


L’annonce publiée est succincte, ne décrivant que l’activité, la localisation, le chiffre d’affaires et le nombre de salariés. Elle fixe néanmoins votre calendrier puisqu’il y sera mentionné la date limite de dépôt de votre offre (DLDO), qui est généralement très courte.


Une fois déterminée votre cible, vous devez prendre attache avec l’administrateur judiciaire, lui indiquer que vous êtes intéressé et lui demander l’accès aux données de l’entreprise cédée.


A ce stade, seule la preuve de votre sérieux est requise : vous devrez communiquer vos documents d’identité (ou le kbis de la société repreneuse) ainsi qu’un engagement de confidentialité vous empêchant de divulguer toutes les informations dont vous pourriez avoir connaissance.


Le Cabinet vous représente et fait le lien avec l’administrateur judiciaire dès la manifestation de votre intérêt.


Ensuite, un bilan juridique et financier


L’administrateur judiciaire vous donnera l’accès aux documents que vous devrez étudier attentivement - la data room :

  • La présentation de la société ;
  • L’inventaire ;
  • Les contrats de travail ;
  • Le bail commercial dont bénéficie la société pour exploiter son fonds de commerce ;
  • Les autres contrats (location de matériel, entretien des locaux par exemple) ;
  • L’état des privilèges et nantissements.


Le Cabinet vous accompagne pour auditer l’ensemble de cette documentation et vous alerter sur les risques de chaque contrat.


Parallèlement, vous aurez en tête votre projet et les nécessaires axes d’amélioration à mettre en place pour que le commerce fonctionne : changement de fournisseurs, de mobilier, travaux de modernisation, changement de menus, opérations de communication ...


Une fois ces éléments intégrés, au moins en théorie, vous pourrez et devrez réaliser un business plan, à l’aide de votre Expert-comptable.


Puis, la rédaction d’une offre de reprise


En fonction du bilan établi et de votre projet, vous pourrez déterminer le périmètre de votre offre (vous n’êtes pas obligé de reprendre tous les salariés, vous pouvez limiter votre offre à la reprise du bail commercial, du matériel ou du stock par exemple) et son prix. L’offre de reprise peut alors être rédigée et le Cabinet intervient de nouveau.


Pour être retenue, votre offre devra remplir plusieurs critères, parmi lesquels :


  • La sauvegarde des emplois (qui est le critère le plus important) ;
  • Le maintien de l’activité ;
  • L’apurement du passif de la société.


Surtout, vous devrez démontrer votre capacité financière à pérenniser l’activité dans la durée.


Votre offre devra donc détailler, pour l’essentiel :

  • Votre présentation, ou celle de la société repreneuse, afin de démontrer au Tribunal votre sérieux (en général, c’est un curriculum vitae qui est à exposer et les bilans de vos sociétés) ;
  • Le périmètre de la reprise : les contrats, la clientèle, les stocks uniquement, les salariés, selon votre projet. Vous devrez expressément indiquer que les autres éléments sont exclus pour éviter toute difficulté ;
  • Le prix offert : pour de meilleures chances de succès, vous ne devrez pas avoir recours à un emprunt, même si cela n’est pas impossible. Vous devrez verser le prix directement entre les mains de l’administrateur judiciaire pour que le Tribunal statue sur votre offre : c’est donc un paiement immédiat et sans condition qui est attendu ;
  • Les perspectives d’emploi : vous devrez démontrer au Tribunal que vous allez créer ou maintenir de l’emploi (c’est une description de votre activité et de son fonctionnement).


Une fois prête et signée, l’offre est transmise au mandataire qui la communiquera lui-même au Tribunal.


Et son étude par le Tribunal


L’offre transmise est ferme et définitive : vous ne pourrez plus la retirer ni la modifier.


Si l’entreprise en difficulté est cédée dans le cadre de son redressement judiciaire, l’administrateur judiciaire pourra vous communiquer, 48 heures avant l’audience au cours de laquelle le Tribunal statuera, un tableau de toutes les offres transmises. Vous pourrez alors améliorer votre offre en reprenant davantage d’éléments du fonds de commerce ou en augmentant votre prix.  


Pour davantage de chances de succès, il est important de se présenter au Tribunal et d’exposer votre offre. Le Cabinet vous accompagnera sans difficulté.


Votre offre a été retenue, vous êtes presque propriétaire d’un nouveau fonds de commerce !


Le transfert de propriété du fonds de commerce implique la rédaction d’un acte de cession, entérinant votre acquisition.


Toutefois, en général, vous disposez, dès l’ordonnance du Tribunal de la possibilité d’exploiter le fonds : pensez à le faire assurer immédiatement, conformément aux clauses de votre bail commercial.  


A ce stade, vous aurez la possibilité de solliciter un financement bancaire afin de couvrir les frais liés au projet : les travaux envisagés, l’acquisition d’une licence, ainsi que les frais et honoraires divers, tels que les droits d’enregistrement de la cession auprès du Trésor Public, comme pour toute acquisition, ainsi que tous les frais liés à la vente (par exemple, les frais du rédacteur de l’acte de vente, les frais de purge des sûretés auprès du Tribunal de commerce).


Comme vous l’aurez compris, à chacune de ces étapes, la présence d’un avocat et d’un expert-comptable s’avère déterminante, notamment pour évaluer les risques suivants :


  • Il n’y a aucune garantie sur les éléments qui sont cédés : par exemple, le matériel peut être dans un état d’usure avancé alors que vous en aurez estimé un prix valeur neuve. Puisque vous n’aurez pas accès aux locaux en amont, l’étude des contrats par le cabinet et des bilans de la société par votre expert-comptable vous permettra probablement de déterminer sa valeur ;


  • Dans l’hypothèse de sûretés inscrites sur le fonds, vous devrez veiller à adapter le prix de votre offre, selon que vous repreniez les échéances des emprunts contractés ou non ;


  • Les éventuels loyers dus par l’entreprise peuvent être mis à votre charge, ainsi que la reconstitution du dépôt de garantie, qui doivent être pris en compte dans votre business plan, en fonction des clauses du bail commercial et de la situation juridique de l’entreprise en difficulté ;


  • La reprise des salariés licenciés, qui ont un droit de réembauche prioritaire pendant 1 an à compter de leur licenciement, vous oblige à inclure ce recrutement dans votre projet, tant financier que physique.


C’est pourquoi, une telle opération, si elle peut paraitre attractive en termes d’opportunité économique n’en est pas moins risquée. Elle nécessite d’être préparée et appréhendée avec soin pour éviter de mauvaises surprises.