La cession du bail commercial en cas de départ en retraite ou invalidité du locataire

La cession du bail commercial en cas de départ en retraite ou invalidité du locataire

October 18, 2023

L’article L. 145-51 du code de commerce permet aux locataires qui décident de partir à la retraite ou se trouvent en état d’invalidité de céder leur bail commercial en modifiant les activités qui y sont exercées : il s’agit d’une procédure de déspécialisation autonome.

 

Plusieurs étapes sont à mettre en œuvre :

Première étape : la demande de retraite ou de pension d’invalidité du locataire

 

Le locataire doit formuler sa demande de retraite en ligne (lassuranceretraite.fr).Pour éviter toute difficulté, le cabinet YM AVOCATS conseille de procéder à cette démarche au moins six mois avant la date envisagée du départ en retraite.

 

Si, avant l’âge légal de départ à la retraite, le locataire se trouve en incapacité de travail -pour des raisons professionnelles ou non - il peut demander à bénéficier de la pension d’invalidité à l’Assurance maladie

 

Deuxième étape : l’information du bailleur et des créanciers inscrits

 

Le locataire doit signifier (c’est-à-dire faire délivrer un acte par un Commissaire de justice) son intention de céder le bail. Cette signification doit être faite au bailleur et aux créanciers inscrits sur le fonds de commerce.

 

Aux termes de cet acte, il doit être indiqué :

-      La nature des activités dont l’exercice est envisagé ;

-      Le prix du droit au bail.

 

Le locataire n’a pas à révéler le nom ou la qualité de son cessionnaire, ni à communiquer quelconque document le concernant, la promesse de cession par exemple.

 

En raison des options ouvertes en réponse à cette signification, nous conseillons au locataire de rédiger une promesse de cession sous condition suspensive de l’accord du bailleur. A défaut, le locataire pourrait être condamné à indemniser son acquéreur, envers lequel il se serait définitivement engagé, à tort.

 

Réponse du bailleur

 

Le bailleur dispose d’un délai de deux mois pour acquérir le bien au prix proposé, accepter ou refuser le changement d’activité.

 

Option 1 : la mise en œuvre de la priorité de rachat du bailleur

 

La signification par Commissaire de justice fait courir le délai de deux mois au cours duquel le bailleur peut faire part de son intention de racheter le droit au bail.

 

Dans cette hypothèse, le locataire et le bailleur établiront un acte de cession, aux conditions proposées par le locataire.

 

C’est ici que revient l’intérêt d’avoir procédé à une promesse de cession du droit au bail sous la condition suspensive de l’accord du bailleur. En effet, si ce dernier acquiert le droit au bail, le cessionnaire envisagé sera purement et simplement évincé, sans indemnité.

 

Pour le bailleur, c’est l’occasion de récupérer son local pour éventuellement le relouer : il convient donc d’agir avec rapidité eu égard au court délai imparti.

 

Option 2 : l’accord du bailleur sur la cession projetée

 

Le silence du bailleur dans le délai de deux mois vaut accord pour la cession projetée. Il peut également bien entendu notifier sonaccord pur et simple.

 

Dans cette hypothèse, et contrairement à la procédure de déspécialisation de droit commun, le bailleur ne peut pas demander l’augmentation du loyer en raison des nouvelles activités autorisées, au cours du bail.  En revanche, il pourra obtenir le déplafonnement au moment du renouvellement du bail.

 

L’acquéreur du droit au bail doit donc prendre conscience qu’en fonction des nouvelles activités qu’il exercera, son loyer pourra être augmenté au moment du renouvellement.  

 

Option 3 : le refus du bailleur

 

Le Bailleur peut refuser le changement d’activité uniquement lorsque les nouvelles activités sont incompatibles avec la destination, les caractères et la situation de l'immeuble. Il a alors deux mois pour saisir le Tribunal Judiciaire et prouver ladite incompatibilité.

 

Ainsi, par exemple, si la destination du bail concerne une activité de vente de livres, le bailleur peut légitimement refuser de transformer la destination du bail en restauration traditionnelle au motif que les installations des locaux (extraction) ou le règlement de copropriété (clause d’interdiction de nuisances par exemple) sont incompatibles.

 

A l’inverse, le Bailleur ne pourra refuser la transformation d’un débit de boissons de 3ème ou 4ème catégorie en un autre commerce, sauf à prouver que ce nouveau commerce entraînerait des nuisances supérieures à celui du débit de boissons transformé.

 

Pendant toute l’instance judiciaire, le locataire doit respecter toutes les clauses de son bail : donc poursuivre son activité et payer son loyer. Un refus du bailleur entraîne donc un blocage du départ à la retraite du locataire, jusqu’à la décision qui sera rendue par le tribunal.

 

Réponse des créanciers inscrits

 

Les créanciers inscrits peuvent, s’ils estiment que le prix proposé ne permettra pas de couvrir la dette restante, réagir dans le délai d’un mois pour faire valoir tout moyen empêchant la cession : vente forcée du fonds de commerce par exemple.

 

Les créanciers ne doivent pas être négligés dans la fixation du prix du bail cédé. Néanmoins, il est courant que les inscriptions(il s’agit en général des emprunts bancaires souscrits en début d’activité)n’aient plus qu’à être purgées.

 

Le cabinet YM AVOCATS conseille donc aux locataires de purger les inscriptions avant de céder le bail, pour éviter des frais de Commissaires de justice et d’éventuelles oppositions infondées le cas échéant.

 

Troisième étape : l’acte de cession de bail

 

L’acte de cession doit nécessairement faire l’objet d’un écrit et, dans l’hypothèse où le bailleur n’est pas l’acquéreur, il doit lui être signifié par voie de Commissaire de justice pour lui être opposable.

 

C’est ainsi qu’il aura connaissance de toute information utile concernant son nouveau locataire.

 

 

***

 

En conclusion, si le départ à la retraite ou l’invalidité du locataire peut lui permettre de céder plus aisément son droit au bail en permettant l’exercice de nouvelles activités, il doit nécessairement anticiper sa demande, tant auprès des services de l’État qu’auprès de son bailleur mais aussi des éventuels créanciers inscrits sur le fonds de commerce, de sorte à ne pas être bloqué par les refus et oppositions qui pourraient survenir.

 

De son côté, le bailleur peut s’opposer au changement d’activité, mais avec le risque d’avoir à indemniser le locataire en cas de refus illégitime ; ou bien l’accepter purement et simplement et tirer avantage de cette cession pour augmenter sensiblement le prix du loyer au moment du renouvellement.

 

Selon que vous soyez bailleur ou preneur, le Cabinet YM AVOCATS vous accompagne à chaque étape de cette opération afin de défendre aumieux vos intérêts tout en évitant le risque d’un contentieux.